CE FOU QUI CONTINUE DE MARCHER

Lorsque Marcel Jobin a fait ses premiers pas de marche athlétique, en 1968, il était loin de croire que ses espadrilles allaient le transporter sur plusieurs centaines de milliers de kilomètres.

Plus d’un demi-siècle plus tard, celui qui s’est fait surnommer le fou en pyjama dans les années 1960 marche encore, cette fois en direction des Jeux panaméricains des maîtres, en juillet à Cleveland, en Ohio. Il sera aussi des Championnats du monde d’athlétisme des maîtres, en août, à Göteborg, en Suède.

Je ne pensais jamais un jour que je ferais quatre sélections olympiques et une carrière si longue, reconnaît Marcel Jobin. « Je me souviens, dans les années 60, je me suis fait mal à un genou. J'étais allé voir un médecin qui m’avait dit : “Jobin, si tu continues à courir de même, à 40 ans, tu vas être dans une chaise roulante.” Je n'avais pas les personnes pour m'encourager à continuer, mais avec ma tête de cochon, j'ai continué. »

Son corps lui permet encore de pourchasser ses objectifs, toujours avec son esprit de compétition très aiguisé.

Je ne veux pas arrêter de faire de la compétition, raconte-t-il. Je continue pour gagner des médailles, c’est ça qui me motive à m’entraîner, même si j’ai 82 ans.

À ses côtés depuis 1976, son collaborateur devenu ami et allié, Michel Parent, l’encourage dans son parcours depuis près de 50 ans.

Marcel, son plus grand secret, c'est un travaillant de nature, indique-t-il. C'est un persévérant, un gars qui n’a pas peur d'oser. À un moment, tout le monde rigolait autour de sa discipline, puis il a osé et il a franchi des obstacles que beaucoup de gens n'auraient pas franchis. Il aurait pu abandonner très souvent, mais il a continué.

Tomber et se relever

Marcel Jobin a dû traverser de nombreuses épreuves tout au long de sa carrière. Dans les dernières années, c’est son corps et sa santé qui ont souffert.

Après une déchirure ligamentaire en 2021, une embolie pulmonaire à la suite d’une COVID longue en 2022, il a dû subir une intervention chirurgicale l'automne dernier en raison d'une hernie abdominale qui s'est déclarée lorsqu'il était au Mexique pour une compétition.

Aux Jeux panaméricains au Mexique, j’ai fait le 5 km, et ça m’est arrivé après le 5, se souvient-il. Le lendemain matin, je voulais participer au 10 km, mais Michel m’a dit de ne pas prendre de chance, donc je n’ai pas pu faire le 10 km.

Aujourd’hui, il est rétabli et parcourt entre 30 et 50 km par semaine en préparation de ses prochaines compétitions internationales, prévues en 2024.

Les gens me demandent où j’ai mal et je réponds que j’ai mal partout quand je me lève le matin, lance, avec un sourire, l’octogénaire marcheur. Mais une fois que je suis réchauffé, je ne le sens plus.

Son allié lui souhaite une année 2024 loin du bistouri. De ce que je vois présentement, il est en bonne santé, indique Michel Parent.

Il a surmonté des défis. Je dis souvent que Marcel tombe, Marcel se relève et Marcel gagne.

Regard sur la relève

Marcel Jobin a travaillé fort pour développer l’intérêt envers sa discipline. « Je me bats depuis des années pour faire reconnaître ma discipline. Par mon exemple, j’ai amené du monde, mais aujourd’hui, il n’y a presque plus de marcheurs, à part Evan Dunfee », se désole-t-il.

Aujourd’hui, il préfère utiliser son énergie pour lui-même, tout en se rappelant certaines bonnes années à côtoyer le médaillé olympique Guillaume Leblanc. Aux championnats canadiens, il a toujours fini derrière moi, et à Barcelone, quand il a gagné une médaille d’argent au 20 km, il y a une petite partie de la médaille que je pourrais prendre, se rappelle-t-il en souriant.

Une fierté qui est d’ailleurs un trait souligné par Michel Parent. Un de ses secrets, c’est la question pour lui de fierté, d'être fier de ce qu'il est, mentionne-t-il. Comme il dit souvent, c'est un petit gars bien ordinaire qui a réussi à faire des choses extraordinaires, parce qu’au-delà de sa participation à des Jeux olympiques, il y a aussi tout ce rayonnement de son sport.

Marcel Jobin a bien l’intention de se rendre aux Mondiaux de 2024 et de 2025. Par la suite, il a déjà des objectifs définis. Je vais peut-être arrêter à 84 ans, et à 85, je vais revenir, peut-être dans d'autres disciplines, comme le lancer du poids, le lancer du disque, le lancer du javelot.

Comme quoi l’âge est loin d’être un frein aux ambitions de celui qui a hérité, il y a de cela déjà fort longtemps, du surnom du fou en pyjama en raison de ses espadrilles colorées et de ses survêtements.

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